Le conflit de l’A69 (suite), deux mondes irréconciliables

21 et 22 octobre, la France a vécu au rythme de ce qui ressemble fort à un nouveau « Sainte-Soline ».

Il y a ce que les médias et le gouvernement en ont dit, les éléments de langage répétés par les influenceurs des médias et les imprécations liées aux tenants de ce projet d’autoroute, Delga de la région Occitanie en tête: nous en avons été abreuvés, sommés comme toujours de prendre parti pour une autoroute de plus…ou à tout le moins de ne pas nous en mêler, les opposants étant discrédités.

Mais il y a aussi la narration vu du côté des opposants et d’autres médias plus indépendants du pouvoir, soucieux de l’environnement et attachés aux libertés publiques, à commencer par le droit de manifester. Ceux-là ont tenté, organisés, de mobiliser: une action très suivie, mais partiellement contrariée. D’articles en décryptage, confirmation s’est faîte d’une volonté faîte d’intérêts patronaux et d’ambitions politiques, à l’origine de cette obstination à construire cette A69 inutile.

Témoignages – Dans cette cacophonie de visions irréconciliables, voici quelques voix qui disent à quel point, en France, l’heure n’est plus à bétonner mais à protéger le vivant; quand l’heure du développement pour la vitesse est dépassée par la nécessité de vivre sans ajouter des infrastructures qui lui sont dédiées, routières ou ferroviaires: la vitesse n’est plus un objectif prioritaire, d’autres besoins sont criants;  mais comment le faire entendre quand la démocratie participative institutionnelle ne mène nulle part face au rouleau compresseur? C’est bien la question qui se pose aujourd’hui à tous les citoyens en France, à nous tous, et pour tous les projets structurants, autoroutes et LGV. Le clivage est réel, la radicalisation des points de vue opposés est actée…

  • Tous pour l’A69? Un sondage est venu infirmer l’idée médiatisée d’une autoroute voulue par tous, selon les promoteurs du projet: « 61 % des personnes interrogées dans le Tarn et la Haute-Garonne déclarent être favorables à l’abandon du projet d’autoroute reliant Castres et Toulouse. Encore plus significatif, 82 % des sondés plébiscitent le principe d’un référendum local, occasion de sortir par le haut d’une situation tendue qui s’aggrave de jour en jour. Les résultats de ce sondage commandé par Agir pour l’Environnement et le collectif La Voie Est Libre, et réalisé par l’IFOP sont sans appel. La population locale estime que ce projet aura un impact négatif sur la biodiversité (67 %) et sur le climat (56 %). À raison, puisque ce projet décrié va engloutir près de 400 hectares de précieuses terres agricoles, tout en contribuant à détruire des centaines d’arbres centenaires. Tout cela, pour un gain de temps insignifiant d’à peine quinze minutes entre Castres et Toulouse, pour la modique somme de 17 euros l’aller-retour ! »

 

  • Et les agriculteurs? une centaine d’exploitations amputées, 80 à 100 agriculteurs impactés, 1000 hectares concernés, nappes phréatiques touchées… Expropriation, surveillance… L’A69, un « enfer » pour les agriculteurs: un article de Reporterre.

  • Ce qui fait écho à son autre enquête décryptant les (faux) arguments écologiques: L’A69, une autoroute écolo ? On a vérifié (reporterre.net) « Ce sera l’autoroute « du XXIe siècle ». Atosca, le concessionnaire de l’autoroute Toulouse Castres, promet un ruban d’asphalte conçu avec « des solutions de dernière génération » qui intégrerait « les dernières normes les plus strictes sur les plans environnemental et climatique ». Bus à hydrogène, plantation d’arbres, huiles essentielles contre les odeurs d’usine… Reporterre a listé — et démonté — le greenwashing de l’A69″.

 

 

  • « Alors, heureux? » de joyeux et festif, le rassemblement a pu montrer plusieurs autres visages dès lors que les forces de l’ordre sont intervenues pour empêcher une ZAD – Témoignage sous forme de communiqué:

De « RAMDAM SUR LE MACADAM »

🤬 Un communiqué – « A69 – Attaque brutale de la police sur le campement et les bâtiments occupés le long du chantier – Une assemblée de climatologues couverte de lacrymo, des départs de feux dans les champs et des militant-e-s tabassés au sol.

🚨 Ce matin vers 11h30, la préfecture a décidé de faire usage de la force et de brutalement évacuer le site de la Crémade et ses bâtiments remarquables expropriés sur le tracé de l’A69. La veille, dans la foulée de la manifestation ayant rassemblé plus de 10 000 personnes, les opposant·es à l’autoroute avaient repris possession des lieux confisqués par Atosca !

Les gendarmes mobiles ont fait irruption sur le site et le campement alentour en tirant des lacrymogènes… en plein milieu de l’assemblée de l’ATECOPOL, animée par des dizaines de scientifiques, dont des membres du Giec expliquant la gravité de la crise climatique et l’importance d’arrêter les projets comme l’A69. Ces tirs ont provoqué plusieurs départs de feu dans les champs et bois environnants, une situation extrêmement dangereuse pour le lieu et les personnes présentes. Ce sont les opposant·es qui, heureusement, sont intervenu·es pour stopper les départs de feu.

La préfecture sait à quel point les feux peuvent se propager rapidement dans la zone en cette période sècheresse historique, en témoigne l’arrêté préfectoral du 6 octobre interdisant l’apport et l’usage du feu sur les terrains en nature de bois, landes et leurs environs : https://www.tarn.gouv.fr/index.php/contenu/telechargement/17855/173316/file/recueil-81-2023-408-ap%20INTERDICTION%20EMPLOI%20DU%20FEU%20-special.pdf#anchor-0

🌪 Les gaz ont recouvert le campement où étaient installées les tentes et l’espace de soutien psychologique et où s’étaient repliées les familles avec enfants.
Suite à cette attaque brutale de la police, 40 blessé·es, par palets, grenades de désencerclement, coups de matraques, et par une multitude de brûlures aux lacrymos ont été pris en charge. Le militant récemment en grève de la faim Thomas Brail en fait partie, ayant été frappé et évacué.

La zone de la Crémade a finalement été complètement évacuée et barricadée par la police vers 15h. Certain·es responsables politiques soutenant ce désastre, comme Carole Delga, restent silencieux·ses : cautionnent-ils de mettre le feu aux champs ? De frapper au sol des personnes mains levées ? De tirer des lacrymos vers des tentes et un parking ?

D’autres comme Gerald Darmanin, inventent de toute pièce (https://twitter.com/GDarmanin/status/1716048442072400079) des « violences inouïes » du côté des manifestant·es pour cautionner le déchaînement policier et couvrir cette expulsion sans procédure juridique contradictoire. Depuis la désignation des « eco-terroristes » à Sainte-Soline, la stratégie trumpiste du ministre de l’intérieur pour réprimer le mouvement écologiste est stable : plus le mensonge est gros plus il espère qu’il passe.
Nous dénonçons une fois de plus la répression et la politique de fuite en avant climaticide du gouvernement dont la construction de l’A69 est emblématique.

L’apaisement de la situation ne sera possible qu’avec le retrait de la gendarmerie de la zone de la Crémade et l’arrêt des chantiers. La Voie Est Libre rappelle qu’un référendum sur l’A69 est aujourd’hui demandé par 82% des habitant·es du Tarn et de la Haute-Garonne, qui rejettent à 61% le projet d’A69.
Nous continuerons d’agir : no macadam ! ✊ »

Voilà qui est dit, à suivre donc…

 

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