La réindustrialisation de la France, qui peut être contre? Eh bien, permettez-nous de nuancer la réponse…car tout dépend des conditions de mise en oeuvre de cette réindustrialisation, que ce soit pour des raisons de démocratie, de choix économiques ou de craintes liées à l’écologie…
Il faut d’abord savoir que la planification de projets industriels ou structurants, exsangue en France, devient en 2020 « riche » d’un grand planificateur, mais relève cependant du fiasco! Ce Haut-Commissaire (F.Bayrou) disposait pourtant du support des administrations et services de l’Etat ainsi que de France Stratégie. Que s’est-il passé?
« Nommé Haut-commissaire au Plan lors du conseil des ministres du 3 septembre 2020, François Bayrou est chargé d’animer et de coordonner les travaux de planification et de réflexion prospective conduits pour le compte de l’État, ainsi que d’éclairer les choix des pouvoirs publics au regard des enjeux démographiques, économiques, sociaux, environnementaux, sanitaires, technologiques et culturels. » La France alors gouvernait à court terme, et grâce à sa mission, le HCP se faisait fort « d’enraciner dans le débat public les décisions à 10, 20 ou 30 ans ». Difficultés structurelles ou autres manques d’aides à la Recherche & Développement public, subventions sans exigences de contrepartie (la Covid ayant « bon dos »), en 2022 le bilan s’avérait inexistant, et sans débat public national prospectif et anticipateur…Tant et si bien qu’en 2024, après des interrogations en Assemblée Nationale, un rapport budgétaire du Sénat sur cette mission appelait à clarifier « la répartition des compétences entre les différents organes chargés de la prospective et de la planification en France« . En 2024, la France enregistre un solde négatif de -15 usines, avec davantage de fermetures que d’ouvertures. C’est une première depuis 2016, marquant une nouvelle étape dans le transfert des capacités industrielles françaises vers d’autres pays (#mondialisationheureuse) Lire: Un apport jugé « très mitigé » : un rapport du Sénat plaide pour une refonte du Haut-commissariat au Plan – Public Sénat – Dénoncés la superposition d’organismes différents voire le manque d’anticipation, objet même de la mission…
Entre temps, un maquis incontrôlé de projets voltaïques ou de bois-énergie naît, lié aux opportunités énergétiques, tandis que des annonces d’orientation industrielle sous lobbying sont faîtes sans débat national depuis l’Elysée, par exemple sur le Nucléaire…et sortent également des textes visant à accélérer l’industrialisation, au prétexte de « simplification administrative », « les normes » étant jugées trop contraignantes (sic) car permettant les recours et donc des délais supplémentaires: la population et ses associations ont le grand tort, lorsqu’elles s’intéressent aux projets localement, à vouloir comprendre et à utiliser les voies démocratiques de la Justice. C’est ennuyeux pour les décideurs! Il a donc été décidé, au service d’un modèle contesté, de contrer ces empêcheurs d’agir librement:
- dans l’arsenal des mesures et décisions visant à raccourcir les délais d’implantation d’industries ou d’infrastructures, existent déjà la DUP (Déclaration d’Utilité Publique visant, par décret ou simple arrêté préfectoral, à exproprier et éventuellement à ne pas respecter le verdict négatif de l’Enquête Publique: ex. LGV), la non contestation par la France des diktats de la Commission européenne, les délais en justice sans arrêt de travaux (ex. A69), la baisse en subventions et personnels des services de contrôle de l’Etat, le droit récent aux préfets à décider localement (ainsi que récemment: SIMPLIFICATION PROJETS LOCAUX 1-Circulaire n° 6460-SG du 28.10.24), la criminalisation des opposants en défense de l’Environnement, etc. Et on citera notamment la récente parution d’une première liste de sites « clés en main », permettant de supprimer les études d’impact environnemental. (voir: 1776_-_DP_-SitesClesEnMain ).
- aujourd’hui, c’est une très brève consultation du Public, du 04/12/2024 au 27/12/2024, qui attire notre attention – En effet, afin de raccourcir les délais de réalisation de projets industriels, il s’agirait par décret de déroger aux procédures incluant un Débat Public conduit par l’indépendante CNDP (Commission Nationale du Débat Public), en fait de déroger au Code de l’Environnement! (on peut d’ailleurs s’interroger sur la légalité d’une telle consultation pour un décret, sous gouvernement démissionnaire: peut-on la qualifier « d’affaire courante »…)
« Ce projet de décret a pour objet d’accélérer l’implantation des projets industriels en supprimant l’obligation de saisir la Commission nationale du débat public (CNDP). Il fait suite à la déclaration de politique générale du 31 janvier 2024 dans laquelle l’ancien Premier ministre annonçait vouloir « centrer le travail de la CNDP sur les très grands projets d’envergure nationale pour libérer un grand nombre de projets de la procédure de la CNDP ». Ce souhait a été réaffirmé par l’actuel Premier ministre lors d’annonces faites le vendredi 29 novembre 2024.
Le champ de la CNDP est fixé aux articles L.121-1 et L.121-8 du code de l’environnement.
L’article R. 121-2 du même code vient préciser les catégories de projets concernés en les ventilant entre saisine obligatoire et saisine facultative. Parmi ces projets figurent les équipements industriels. »
Cette consultation aux délais resserrés ne fait l’objet d’aucune médiatisation officielle, et s’avère fort dangereuse: lors du Débat public, les citoyens et leurs associations ont en effet le droit de demander toutes sortes de précisions aux acteurs d’un projet, permettant de nourrir ensuite les cahiers d’acteurs et contributions citoyennes lors de l’Enquête publique: « Le débat public est une procédure du Code de l’environnement qui permet la participation de tous au processus d’élaboration d’une politique publique ou d’un projet à forts enjeux socio-économiques ou environnementaux. » Le fonctionnement du débat public
En conséquence, le CADE fait appel à la vigilance de tous: consultez, et participez à cette consultation rapidement. LIRE ainsi que les premières contributions sur: Consultation du public sur le projet de décret modifiant les catégories de projets soumis à la Commission nationale du débat public (CNDP) | Consultations publiques