Une tribune de parlementaires pour la lutte contre le réchauffement climatique

Un an après l’Affaire du siècle, 49 députés de la Nouvelle Union populaire écologique et sociale (Nupes) demandent à l’Etat de faire preuve de plus de volontarisme dans la lutte contre le réchauffement climatique. Voici leur tribune :

« Le 3 février 2021, le tribunal administratif de Paris avait reconnu la carence de l’Etat dans le respect des objectifs qu’il s’était lui-même fixés en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre et avait pour la première fois transposé la notion de préjudice écologique en droit administratif. Par la suite, le 14 octobre 2021, le tribunal administratif de Paris a relevé que le plafond d’émissions de gaz à effet de serre avait été dépassé de 62 millions de tonnes équivalent CO2. Il a donc enjoint l’Etat de réparer les conséquences de sa carence en matière de lutte contre le changement climatique en donnant jusqu’au 31 décembre 2022 à l’exécutif pour prendre « toutes les mesures utiles » afin de compenser l’excès d’émissions de CO2 constaté entre 2015 et 2018. C’était l’Affaire du Siècle.

Enfin ! La protection du climat, le respect des limites planétaires, la protection du vivant, intègrent peu à peu notre droit, deviennent peu à peu, grâce à l’action d’associations et de millions de citoyen-nes, des obligations pour les acteurs privés comme pour l’Etat. Elles deviennent autant de protections pour celles et ceux qui voient leurs conditions de vie, et les conditions d’exercice de leurs droits, menacés.
Face à la génération climat, le gouvernement attend. Regarde les sécheresses, les canicules, les pénuries s’accentuer en semblant découvrir une catastrophe prédite depuis plus de 40 ans.

Est-ce que l’Etat et sa représentation, ont pris la mesure de ce que ces décisions signifient en matière d’obligations nouvelles qui sont attachées à son action ? Est-ce qu’il prend la mesure de la nécessité désormais de l’obligation d’agir pour le climat, pour le vivant ? Est-ce qu’il prend la mesure, lui qui est garant des droits fondamentaux de sa population, des menaces aux droits à la santé, au travail, à la dignité, à la propriété, à un toit, à la vie parfois, qui pèsent sur nos concitoyen-nes du fait de sa carence fautive ?

Des millions de citoyens français ont envahi les rues ces dernières années pour alerter sur l’urgence d’agir pour le climat et pour leurs droits, aux côtés de milliers de scientifiques et de nouvelles générations. Face à cette génération climat, le gouvernement attend. Regarde les sécheresses, les canicules, les pénuries s’accentuer en semblant découvrir une catastrophe prédite depuis plus de 40 ans, pour monter au 15 août, après plus de 6 mois de déficit de pluviométrie majeure, une cellule interministérielle sur la sécheresse, dont on ne connaît pas encore les conclusions.
Corinne Le Querré, Présidente du Haut Conseil pour le Climat, l’a dit : « La France n’est pas prête à répondre au réchauffement climatique ». Aujourd’hui, le réchauffement de la planète est de + 1,1°C par rapport à la période préindustrielle et 25 % de la population mondiale sera désormais exposée à des vagues meurtrières de chaleur urbaine.
Il faut des mesures radicales et immédiates pour garantir un avenir, non pas économiquement stable, non pas heureux, mais simplement vivable.
Or, dans le cadre de l’accord de Paris, dont l’objectif était de limiter le réchauffement de la planète +1,5°C, la France s’était engagée à réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 40% d’ici 2030 par rapport à 1990.
  • Toutefois, dans le cadre du pacte vert pour l’Europe publié en juillet 2021, l’Union Européenne s’est fixé l’objectif contraignant de parvenir à la neutralité climatique d’ici à 2050 ; l’Union Européenne a relevé son ambition climatique, en s’engageant à réduire ses émissions de gaz à effet de serre d’au moins 55 % d’ici à 2030.
  • A l’inverse, la France a fait le choix de rester à son objectif initial de 40%.
Selon le dernier rapport du PNUE, « Emissions Gap Report », les contributions nationales actuelles nous mènent déjà sur une trajectoire de réchauffement de 3,2° C d’ici la fin du siècle. Le groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) quant à lui a indiqué que si l’humanité continue la trajectoire qu’elle est actuellement en train de suivre, nous nous dirigeons vers les deux projections les plus pessimistes, soit un réchauffement d’ici 2100 de 2,8°C à 4,6°C pour le quatrième scénario, ou de 3,3°C à 5,7°C pour le cinquième.
Lire aussi – TRIBUNE. « Tempête sur l’écologie : et si on (re)parlait politique ? »
Transition énergétique et sobriété juste, fin de la surconsommation et de l’obsolescence programmée, alternatives aux mobilités carbonées pour celles et ceux qui en sont les plus dépendant-es, rénovation thermique des logements, relocalisation industrielle, développement de nouveaux modèles agricoles, dépendance aux plastiques toxiques et aux produits pétroliers : le gouvernement semble avoir entendu parler du climat, pas de l’urgence.
Il faut des mesures radicales et immédiates pour garantir un « avenir », non pas
économiquement stable, non pas heureux, mais simplement « vivable », selon le GIEC.
Nous sommes en train de construire notre propre effondrement. Et ils ne pourront pas dire qu’ils ne savaient pas. Nous l’affirmons : Être prospère aujourd’hui, c’est se donner les moyens de garantir la poursuite de l’aventure humaine dans vingt ou trente ans.
Comme la Cour internationale de justice l’avait énoncé et ce dès le 8 juillet 1996 « l’environnement n’est pas une abstraction mais bien l’espace où vivent les êtres humains et dont dépendent la qualité de leur vie et leur santé pour les générations à venir. »
Ce siècle s’imposera à vous, comme à nous
C’est pourquoi, à la suite des 2,3 millions de citoyennes et de citoyens qui ont porté l’Affaire du Siècle, à la suite des milliers de scientifiques qui ont alerté toutes ces dernières années, à la suite des centaines de milliers de jeunes qui ont fait valoir leur anxiété face à un avenir qui se restreint de plus en plus dans nos rues, à la suite des 150 de la Convention Citoyenne, nous parlementaires exigeons, en cette rentrée parlementaire et un an après l’injonction faite à l’Etat de réparer les surplus d’émissions, que le gouvernement nous fasse la preuve d’avoir pris « toutes mesures utiles » pour enfin respecter ses propres engagements.
Après une rentrée symboliquement ouverte autour de l’accélération des travaux d’un terminal méthanier servant à accueillir du gaz de schiste américain, nous demandons à ce qu’enfin, chaque politique publique, chaque loi que nous votons dans notre hémicycle soit assortie d’études d’impact environnemental, et respecte les limites planétaires. Les citoyen-nes, faute d’un gouvernement volontaire, construisent un droit climatique par l’action contentieuse et la jurisprudence.
Faute d’action de votre part, nous pourrons bien voter toutes les lois, nous pourrons bien faire les plus beaux discours, dans une plus grande violence et dans une plus grande injustice encore, ce siècle s’imposera à vous, comme à nous. »
La liste des 49 signataires :
1. Marie Pochon, Députée de la 3ème circonscription de la Drôme
2. Cyrielle Chatelain, Députée de la 2ème circonscription de l’Isère
3. Christine Arrighi, Députée de la 9ème circonscription de Haute-Garonne
4. Julien Bayou, Député de la 5ème circonscription de Paris
5. Lisa Belluco, Députée de la 1ère circonscription de la Vienne
6. Karim Ben Cheikh, Député de la 9ème circonscription des Français établis hors de France
7. Charles Fournier, Député de la 1ère circonscription Indre et Loire
8. Marie-Charlotte Garin, Députée de la 3ème circonscription du Rhône
9. Jérémie Iordanof, Député de la 5ème circonscription de l’Isère
10. Hubert Julien-Laferrière, Député de la 2ème circonscription du Rhône
11. Julie Laernoes, Députée de la 4ème circonscription de Loire Atlantique
12. Benjamin Lucas, Député de la 8ème circonscription des Yvelines
13. Francesca Pasquini, Députée de la 2ème circonscription des Hauts-de-Seine
14. Sébastien Peytavie, Député de la 4ème circonscription de la Dordogne
15. Jean-Claude Raux, Député de la 6ème circonscription de Loire-Atlantique
16. Sandra Regol, Députée de la 1ère circonscription du Bas-Rhin
17. Sandrine Rousseau, Députée de la 9ème circonscription de Paris
18. Eva Sas, Députée de la 8ème circonscription de Paris
19. Sabrina Sebaihi, Députée de la 4ème circonscription des Hauts-de-Seine
20. Aurélien Taché, Député de la 10ème circonscription du Val-d’Oise
21. Sophie Taillé-Polian, Députée de la 11ème circonscription du Val-de-Marne
22. Nicolas Thierry, Député de la 2ème circonscription de Gironde
23. Hendrik Davi, Député de la 5ème circonscription des Bouches-du-Rhône (LFI-NUPES)
24. Alma Dufour, Députée de la 4ème circonscription de Seine-Maritime (LFI-NUPES)
25. Catherine Couturier, Députée de la 1ère circonscription de la Creuse (LFI-NUPES)
26. Arthur Delaporte, Député de la 2ème circonscription du Calvados (Socialistes et apparentés – NUPES)
27. Dominique Potier, Député de la 5ème circonscription de Meurthe-et-Moselle (Socialistes et apparentés – NUPES)
28. Loïc Prud’homme, Député de la 3ème circonscription de la Gironde (LFI-NUPES)
29. Marie-Noëlle Battistel, Députée de la 4ème circonscription de l’Isère (Socialistes et apparentés – NUPES)
30. Christine Pirès-Beaune, Députée de la 2ème circonscription du Puy-de-Dôme (Socialistes et apparentés – NUPES)
31. Chantal Jourdan, Députée de la 1ère circonscription de l’Orne (Socialistes et apparentés – NUPES)
32. Jean-Hugues Ratenon, Député de la 5ème circonscription de la Réunion (LFI-NUPES)
33. Pascale Martin, Députée de la 1ère circonscription de la Dordogne (LFI-NUPES)
34. Iñaki Echaniz, Député de la 4ème circonscription des Pyrénées-Atlantiques (Socialistes et apparentés – NUPES)
35. Karen Erodi, Députée de la 2ème circonscription du Tarn (LFI-NUPES)
36. Ségolène Amiot, Députée de la 3ème circonscription de Loire-Atlantique (LFI-NUPES)
37. Boris Vallaud, Député de la 3ème circonscription des Landes (Socialistes et apparentés – NUPES)
38. Olivier Faure, Député de la 11ème circonscription de Seine-et-Marne (Socialistes et apparentés – NUPES)
39. Mickaël Bouloux, Député de la 8ème circonscription d’Ille-et-Vilaine (Socialistes et apparentés – NUPES)
40. Louis Boyard, Député de la 3ème circonscription du Val-de-Marne (LFI-NUPES)
41. Damien Maudet, Député de la 1ère circonscription de Haute-Vienne (LFI-NUPES)
42. Manon Meunier, Députée de la 3ème circonscription de Haute-Vienne (LFI-NUPES)
43. Gabriel Amard, Député de la 6ème circonscription du Rhône (LFI-NUPES)
44. Aymeric Caron, Député de la 18ème circonscription de Paris (LFI-NUPES)
45. Sylvain Carrière, Député de la 8ème circonscription de l’Hérault (LFI-NUPES)
46. Sylvie Ferrer, Députée de la 1ère circonscription des Hautes-Pyrénées (LFI-NUPES)
47. Clémence Guetté, Députée de la 2ème circonscription du Val-de-Marne (LFI-NUPES)
48. Anne Stambach-Terrenoir, Députée de la 2ème circonscription de Haute-Garonne (LFI-NUPES)
49. Murielle Lepvraud, Députée de la 4e circonscription des Côtes d’Armor (LFI-NUPES)

 

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