La guerre de l'eau est déclarée en Nouvelle-Aquitaine

Les élu·e·s écologistes au Conseil régional de Nouvelle-Aquitaine nous font parvenir leur lettre d’actualité de janvier 2019 – La guerre de l’eau est déclarée en Nouvelle-Aquitaine
NAUn protocole finançant l’agriculture durable qui ne respecte pas les engagements pris… En juin dernier, notre groupe a voté la politique régionale de l’eau en saluant, notamment, un dispositif ne permettant pas de financer les projets de retenues en Deux-Sèvres, Vienne, Charente et Charente-Maritime.
Au-delà d’une victoire des élu·e·s écologistes, nous y voyons le résultat d’une large concertation, ainsi qu’une victoire de la mobilisation citoyenne et associative ainsi que la reconnaissance de la nécessité d’instaurer une gouvernance partagée entre les différents usagers de l’eau.
Or, la délibération 14 bis de la séance plénière du 17 décembre 2018
portant sur le protocole d’accord pour une agriculture durable dans le territoire du bassin Sèvre niortaise-Mignon impliquait :
* la création des retenues de substitution, soit 16 bassines ;
* leur financement, identifié comme une «éventualité» dans la délibération, à hauteur de 25 % du montant total pour notre collectivité, même si en grande partie issu de fonds européens.
… deux de nos élus démissionnent de leur délégation
Notre groupe a voté contre cette délibération, y voyant une manœuvre réalisée sans concertation, et votée contre des composantes de la majorité, considérant que ce protocole n’apporte aucune des garanties indispensables à une transition écologique responsable et cohérente.
Suite à ce vote, Nicolas Thierry, vice-président en charge de la biodiversité et de l’environnement et Nicolas Gamache, délégué au patrimoine naturel, ont annoncé leur démission :
* de la délégation à la qualité de l’eau pour Nicolas Thierry ;
* du bureau du Parc naturel régional (PNR) Marais-Poitevin pour Nicolas Gamache.
« Le soutien de la Région à ce projet est incompatible avec nos responsabilités climatiques, avec l’impératif d’une gestion de l’eau juste, solidaire, concertée et préservant les écosystèmes, qui est le sens de la stratégie que nous avons votée en juin dernier. C’est la première bataille de l’eau climatique sur notre territoire, qui doit nous conduire à une réorientation radicale de nos priorités dans les usages de l’eau» a indiqué Nicolas Thierry.
Quant à Nicolas Gamache, il a expliqué que : «lors de la séance du bureau du Parc naturel régional (PNR) du 7 décembre dernier, Pierre-Guy Perrier, le président du PNR, s’était engagé à ne pas signer le protocole du fait de l’absence de compétence du PNR sur les questions hydrauliques. Or, le président du PNR s’est rendu [le 18 décembre 2018] à Niort pour signer le protocole».
(Lire l’article de Aqui.fr du 18/12/2018) –
L’eau bien commun de l’humanité doit être partagée entre tous
Le problème central reste celui de l’eau, et non pas celui de l’agriculture, quand bien même le protocole mentionne la transition agricole du territoire.
Accepter ce protocole, c’est :
* augmenter le risque de perturber le grand cycle de l’eau sur le bassin versant présent, entre la rivière et l’estuaire, avec toutes les conséquences sur la continuité écologique ;
* priver la quasi totalité des agriculteurs de cette précieuse ressource ;
* ouvrir la porte aux demandes de dizaines d’autres projets de bassines.
Les chercheurs du CNRS de Chizé qui travaillent sur le rapport Acclimaterra ont montré que le modèle agricole a évolué et que l’on peut faire de l’agro-écologie sans pour autant avoir recours à des infrastructures gigantesques, comme celles des bassines prévues.
Nous voulons une vraie transition écologique et une vraie transition agricole : écoutons la parole des scientifiques !
Trop d’incohérences dans ce protocole
Nicolas Gamache, qui exprimait la parole du groupe lors de l’examen de la délibération n’a pas manqué d’en souligner les incohérences :
* la collectivité territoriale s’était engagée pour un consensus total sur le territoire afin de donner suite au projet des bassines. Or, il s’avère ce n’est pas le cas dans la mesure où un grand nombre d’acteurs rejettent ce protocole : l’APIEE, le GODS 79, la Confédération paysanne, au moins une des mairies concernée, ainsi que de nombreuses autres structures et les citoyens qui n’étaient pas conviés dans le comité mis en place par la Préfète.
* ce protocole ne peut être assimilé à un projet de territoire, c’est un protocole autour des terres d’irrigation sur certaines exploitations et qui omet une grande partie du territoire où se situe l’implantation des bassines mais aussi, au-delà, notamment les communes de Charente-Maritime où le Mignon suit son cours et où les communes n’ont pas été mises autour de la table.
* sortie des pesticides : aucun objectif chiffré n’est mentionné, est juste notée une « réduction » à discrétion des agriculteurs.
Une priorité absolue pour l’argent public : la transition écologique
Léonore Moncond’huy, notre co-présidente, dans le propos introductif tenu en début de plénière interrogeait le bien-fondé de la politique régionale de l’eau : est-elle réellement à la hauteur des enjeux ? « Nous serons fiables et prévisibles » indiquait-elle, « mais nous annonçons la couleur : la situation de l’humanité ne permet pas la demi-mesure, ou les incohérences. En tout cas, nous ne souhaiterons plus y engager notre responsabilité si nos engagements n’étaient pas à la hauteur ».
Et de pointer un projet qui « n’est pas solidaire : allouer 60 millions d’euros dont 70 % de fonds publics, dont 15 millions par la Région, pour entretenir un modèle agricole dépassé, dont plus personne ne peut honnêtement dire que c’est un modèle d’avenir. Et bien sûr, nous avons besoin d’eau pour nous nourrir, et répondre aux besoins de l’agriculture – mais pour quelle agriculture ? Celle qui fait vraiment vivre les territoires, celle qui alimente les circuits courts dont nous avons tant besoin pour nos lycées, celle qui emploie ? Ou celle majoritairement dédiée à l’export et intrinsèquement adossée à l’usage des pesticides ? »
Notre co-présidente l’affirmait avec vigueur : « nous ne souhaitons plus être complices de la mise à disposition de financements publics qui n’engageraient pas une transition écologique responsable vis-à-vis des acteurs de notre Région, autrement dit une politique ambitieuse, courageuse, et à la mesure de l’urgence climatique ».
Toutes nos interventions lors de la séance plénière des 17 et 18 décembre 2018, ainsi que l’intégralité des débats autour des bassines, sont à retrouver sur notre chaine Youtube
La guerre de l’eau est bien déclarée !
Nous l’annoncions le 22 octobre dernier en lançant notre manifeste transpartisan pour le climat de la Région Nouvelle-Aquitaine : toutes les politiques régionales peuvent et doivent être mobilisées pour apporter une réponse efficace face à l’urgence climatique.
Nous resterons intransigeants vis à vis des impératifs climatiques et présents partout où ils sont battus en brèche, comme c’est le cas depuis des semaines dans le Lot-et-Garonne avec la construction du lac artificiel de Caussade .
La création de ce lac détruira plus de 3000 m 2 de zone humide en amont et en aval du barrage et impactera significativement la faune et la flore, dont des espèces protégées (tulipes sylvestres, chauves-souris, coléoptères et six espèces d’oiseaux).

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