Eau : la pompe à profits de Suez se grippe dans l’Essonne – des associations de défense de l’eau, bien vital, encouragent les élus.
A moins de deux mois du retour de la communauté d’agglomération Cœur d’Essonne vers une gestion publique de l’eau, un vent d’indépendance souffle sur le fief départemental de Suez. (information réseau ATTAC)
La perte de cette délégation de service public (DSP) en juin 2015 est rude pour le groupe dirigé par Jean-Louis Chaussade : il en était le principal délégataire depuis 1927. Mais ses ennuis ne s’arrêtent pas là. Une partie des élus de la communauté d’agglomération Paris-Saclay (CPS), dépendante à 80% de Suez pour sa production et son alimentation en eau potable, pousse pour que la CPS reprenne la main sur la gestion de son eau. D’ici 2018, les contrats de délégation d’une dizaine de communes de la CPS arriveront eux aussi à échéance. Le groupe de services industriels risque gros : ces contrats représentent 23 000 abonnés et 3,5 millions de m3 d’eau par an.
Que la concession dure, c’est l’essentiel. La fronde contre Suez, née au sein du collectif associatif Aggl’Eau de la CPS, est montée d’un cran lors du conseil communautaire du 22 mars. Les 78 élus de la CPS, cornaqués par l’ancien DRH de Saur France et président de la CPS Michel Bournat, devaient statuer sur la prolongation jusqu’au 31 décembre 2017 des contrats de concession et travaux de distribution d’eau potable liant l’industriel et la CPS. Pourtant, avec une eau en sortie d’usine vendue 70% plus cher que le barème moyen établi par l’Agence de l’eau Seine Normandie (AESN), il y a urgence pour la CPS à se pencher sur des scénarios alternatifs à la concession. En 2015, le prix de l’eau hors taxe y variait ainsi de 2,40 à 2,66 euros/m3, soit près de 1 euro/m3 de plus que la moyenne nationale.
Damned, un putsch !
Le 22 mars, le conseil communautaire se déroulait au mieux des intérêts du « fontainier » jusqu’à ce que Christian Leclerc, maire divers-droite (DVD) de Champlan tente de lire la déclaration dont l’avait chargé Richard Trinquier maire LR de Wissous. L’élu y dénonçait l’insuffisance des éléments présentés par le bureau d’études IRH ingénieur conseil auquel CPS avait commandé un rapport sur le mode de gestion le plus approprié au regard des standards en matière d’audit établis par la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR). Mais Christian Leclerc n’a pu fini son intervention. Michel Bournat a suspendu la séance en déclarant que « l’objet n’était pas en rapport avec la déli-bération et contribuait à alimenter les ma-nifestants ». Cette pique visait notamment l’association Aggl’Eau-CPS qui milite localement en faveur d’un retour en gestion publique de l’eau.
Audit soit qui mal y pense.
L’audit demandé à IRH ingénieur conseil cristallise la lutte d’influence entre les partisans de la DSP et ses détracteurs. Comme les conclusions du cabinet Espelia, chargé par la CPS d’une première étude mi-2016, celles d’IRH, présentées le 8 mars aux maires des 27 communes de la CPS, sont favorables à la conservation du modèle concessif et donc à Suez. Mais un autre point chagrine les élus frondeurs, dont fait aussi partie Grégoire de Lasteyrie, maire LR de Palaiseau. Le planning prévisionnel, présenté le 8 mars au bureau des maires de la CPS, intègre le vote du 22 mars comme une formalité acquise dans le processus de reconduction de la DSP. Interpellé sur ce point lors du conseil communautaire, Thomas Joly, maire DVD de Verrières-le-Buisson et vice-président de la CPS en charge de l’eau et de l’assainissement, a botté en touche en affirmant que le comité de pilotage chargé du dossier n’avait pas arrêté son choix et que ses conclusions seraient présentées en temps utile.