(image Reporterre) – L’Autoroute A69, serpent de mer juridique – résistance et mobilisation exemplaire des opposants et grands moyens institutionnels pour les porteurs de projet. Comme sans doute toute la France le sait maintenant, et bien qu’encore non jugé au fond, le dossier d’avancement des travaux de l’A69 a été bloqué: en février, la Justice a annulé l’autorisation environnementale nécessaire à la construction de l’A69 et ordonné la suspension des travaux. Pour autant, devenu éminemment politique, la saga de ce projet aux travaux avancés sur le terrain malgré les recours, ne laisse pas de surprendre par ses rebonds juridiques: trop d’intérêts financiers et de pouvoir étant en jeu, le Sénat est venu au secours des porteurs, dont Delga à la Région, le constructeur Atosca et l’entrepreneur Fabre pour principal demandeur de cette autoroute: un vote des Sénateurs pour le moins critiquable d’une décision de Justice. Mais quand le pouvoir politique le veut, la Justice peut aller bien plus vite que quand les citoyens le demandent: dernier mais non ultime rebondissement découlant de cette récente pression, le Rapporteur public recommande à la cour administrative d’appel de Toulouse d’ordonner la reprise du chantier de l’A69, à l’arrêt depuis fin février, et ce deux jours avant le recours par l’Etat contre l’arrêt des travaux. Précisions de ce 19 mai: A69 : avis favorable à la reprise du chantier par le rapporteur public de la cour administrative d’appel de Toulouse
Faire le lien avec la LGV du GPSO – un article très intéressant revient sur le mythe du développement et des besoins de la croissance, qui ne sont pas forcément ceux des populations. Il en va de même pour toutes les grandes infrastructures… « L’entêtement des pouvoirs publics à construire l’autoroute A69 traduit une incapacité à remettre en question le modèle de gestion des infrastructures des années 1960 et 1970, estime le chercheur Nelo Magalhães dans cet entretien. » Le CADE a maintes fois démontré, à partir d’études et de rapports sur les bienfaits socio-économiques attendus des LGV, notamment avec des gares excentrées, combien ce ne sont que chimères (le prétendu « désenclavement »)! Ce dont la population a besoin c’est du plus grand nombre de services de proximité, ce qui s’oppose aux demandes du BTP friand de grandes infrastructures, sur fond de chantage à l’emploi.
En commun pour l’autoroute et le ferroviaire, le dogme libéral européen du libre-échange et de la libre circulation des hommes et des marchandises, synonyme de progrès supposé. En commun également, l’extractivisme que ces deux infrastructures génèrent: sauf à importer, ce sont des carrières, gravières et zones de stockage (sable, gravier, pierres à concasser…) qui s’ouvrent partout pour ces infrastructures, tels des « trous dans un gruyère » de terres agricoles! Car on extrait 350 à 400 millions de tonnes par an, par explosion de roches dures principalement.
(Sur ce sujet, on peut lire utilement: Reporterre A69 : « L’État a tant investi que renoncer lui serait inacceptable ».)
Le plus important juridiquement aujourd’hui, au-delà du coût écologique et financier, est le doute sur la raison impérative d’intérêt public majeur pour l’A69: ce qui amène évidemment à comparer avec le GPSO* (*nommé maintenant LNSO par les promoteurs: changer « grand projet » en « lignes nouvelles » est sans doute pour eux une prophétie autoréalisatrice; mais nous gardons GPSO pour ce qui n’est encore, pour nous opposants, qu’un projet!). L’instruction du recours porté par cinq associations devant le Tribunal administratif de Toulouse s’est terminée le 24 /04, et sera suivie d’une audience en juillet probablement pour le jugement au fond.
On imagine bien comment le cas de l’Autoroute Castres/Toulouse peut s’appliquer, et pour les mêmes raisons amplifiées, au GPSO: l’impact environnemental et sur la biodiversité est énorme (Avis du Conseil National pour la Protection de la Nature (CNPN)…une solution alternative existant avec la modernisation possible et en cours de la voie actuelle, la « raison impérative d’intérêt public majeur » s’en trouve encore moins démontrée. Les Amis de la Terre Pyrénées estiment qu’au titre de l’article L 411-2 du Code de l’Environnement, l’arrêt du chantier de LGV pourrait être décidé.
Enfin, le sort contraire (provisoirement?) à l’A69 encourage nombre d’opposants au GPSO à multiplier les initiatives : du côté Gironde, ce sont les associations qui visent à faire un sanctuaire de la vallée du Ciron, à lui donner un statut juridique permettant de la protéger d’une future LGV Bordeaux/Toulouse; celle-ci pivotant au niveau de Bernos-Beaulac vers Dax, passe ainsi dans le chevelu aquatique et zones humides avec des « ouvrages d’art » qui font frémir les défenseurs de l’environnement (Le triangle de Bernos-Beaulac avec ses multiples viaducs se trouve juste en amont de la hêtraie. Ces aménagements pourraient affecter la température du Ciron et l’hydrologie locale, et ainsi perturber fortement le fonctionnement de la hêtraie. article LGV NON MERCI).
Du côté Garonne, là aussi les associations amies imaginent un statut juridique reposant sur le Droit de l’environnement qui primerait sur les hypothétiques prétentions économiques ; une sérieuse épine dans le cuir pourtant peu sensible des Delga/Rousset. Avec une pétition « Protéger les droits du fleuve Garonne », l’association Wild Legal est rejointe par plusieurs associations (la Sepanso par exemple). LIRE/ article La Dépêche de Toulouse, qui parle…de la LGV en Gironde.