Lutte contre le changement climatique – un machin européen obèse…les PNiEC

Vous vous ennuyez, ne voulez plus regarder la télévision pleine de drames, refusez de communiquer sur les réseaux pleins de haine, avez fini votre dernier bouquin plein de rêves ? Nous vous conseillons la lecture des liens de cet article: une documentation concernant les PNiEC pleins d’espoir qui énergisent plus propre, vous est proposée par le CADE.

Mais de quoi s’agit-il ? Les PNiEC décrivent la manière dont les pays de l’U.E entendent s’y prendre pour: le rendement énergétique / les énergies renouvelables (voir législation)/ la réduction des émissions de gaz à effet de serre / les interconnexions / la Recherche & Innovation. La France, comme les autres, s’est engagée dans la démarche communautaire de neutralité carbone en 2050.

L’Union Européenne a rendu publique, fin mai, son « Evaluation des Plans Nationaux intégrés en matière d’Energie et de Climat ( PNiEC) », constatant que, en moyenne des pays membres, on se rapproche des objectifs climatiques et énergétiques à l’horizon 2030 (étape intermédiaire). RAPPORT D’EVALUATION: L’UE se rapproche de ses objectifs climatiques et énergétiques à l’horizon 2030 – Commission européenne

« Y’a plus qu’à »… Mais comme toujours, le « diable se cache dans les détails » de cette évaluation globale, et une fois acté le satisfecit global de rigueur, chaque pays doit maintenant faire mieux (ainsi  la France accuse aujourd’hui un retard en matière d’énergie renouvelable, sa contribution étant de 35% pour 44% prévus).

Le diable, dans ce qui n’est pas qu’un détail… le Règlement ESR impose à chaque Etat de réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) d’ici à 2030 (bâtiments, agriculture, petite industrie, déchets, transports intérieurs hors aviation (tiens donc!)… Cependant il faut comprendre, qu’évidemment, ces politiques vertueuses contre les GES coûtent aux budgets des Etats et Collectivités Européens pour bifurquer, et que les idéologies qui président à la gouvernance de chacun influent considérablement sur les moyens de mise en oeuvre socialement acceptables, tandis que les lobbys (du BTP, agrochimiques ou industriels) y voient une aubaine pour se verdir et une source de dividendes… « verdir », c’est toujours de la croissance.

Et en effet, voici quelques constats gênants dans cette évaluation (nos commentaires interprétatifs en italique): globalement et pragmatiquement, la réduction d’émissions de GES ne tiendra pas les 40% prévus de 2025 à 2030. L’espoir demeure pour la neutralité carbone à horizon 2050…mais au vu des constats qui suivent, tempérons notre enthousiasme!

  • Pour les puits de carbone, l’écart est de 45 à 60 Mns T de CO2 sur les prévisions 2030 (règlement UE 2023/839 – UTCATF) : on parle ici de l’affectation des terres et leur utilisation (artificialisation en hausse /demande de biomasse), ainsi que de l’état de la sylviculture (les forêts dépérissent globalement bien qu’elles soient plus étendues, et tendent à une surexploitation / demande d’industrialisation du bois énergie en hausse). Un problème dont il faudra reparler compte tenu de la mode des projets industriels affectant les usages de la filière bois: la stabilisation des puits de carbone a du plomb dans l’aile (cf. projet E-CHO, par exemple en France, gourmand en bois énergie).
  • Si les énergies renouvelables ont augmenté leur part, pour autant la croissance est toujours prônée, et les louables préalables à tout bon plan vertueux que sont la sobriété et l’efficacité énergétiques attendent de se concrétiser faute d’objectifs spécifiques et réalisables (business is business, les affaires continuent quelles qu’en soient les conséquences). Les plans finaux des Etats misent plutôt sur l’innovation industrielle et la résilience des chaînes d’approvisionnement afin de réduire la demande énergétique: il suffit d’y croire… Mais on ne va donc pas vers la réduction programmée et planifiée de la demande en énergie: celle-ci s’accroît! Dans les investissements privés, tous les projets affichent sur leur « fronton » la nécessaire sobriété, mais ceux-ci étant des projets de développement liés à une offre de consommation, on peine évidemment à retrouver le concept vertueux de sobriété autrement qu’à l’état général de voeu pieux!
  • Pour les énergies fossiles, nous n’y sommes pas, faute d’accord de la moitié des Etats pour y renoncer (on sait que le capitalisme glouton empile les sources d’énergie plus qu’il en supprime): généralement dans l’U.E, on  continue de subventionner (sans que la hauteur soit précisée) ou de ne pas taxer certains secteurs qui utilisent l’énergie fossile (aviation, et pas que…). Les calendriers de mesures de diminution des subventions font défaut: c’est problématique.
  • Pour une transition juste, il va falloir attendre: les impacts sociaux et sur l’emploi ne sont pas analysés spécifiquement pour les travailleurs et les régions plus vulnérables, ni pour les ménages, au risque d’inégalités sociales et territoriales plus grandes générées par la politique énergétique (De fait, ceci entraîne l’absence de crédibilité des PNiEC en général quant aux mesures et financements destinés à atténuer l’impact social sur les populations: et l’acceptabilité sociale de projets énergétiques en matière d’infrastructures, de transport, d’industries…ce n’est pas rien!) / Les impacts sur les compétences professionnelles et formations sont décrits plus concrètement, les filières énergétiques étant déjà identifiées. / Quant à la « pauvreté énergétique », elle peine à être définie clairement, et seuls quelques Etats en fixent des objectifs spécifiques de réduction: l’ensemble des Etats intègre tout de même ce concept concernant l’efficacité énergétique dans l’immobilier et sa décarbonation. Réduire les inégalités sociales énergétiques n’est pas en soi le moteur pour les projets de réduction des GES, il faut en plus une volonté politique programmatique plus volontariste des Etats.
  • Pour les estimations d’investissements, les Etats précisent mieux leur engagement pour sécuriser et diversifier les énergies sur fond d’adaptation au changement climatique, de nouvelles interconnexions électriques européennes nécessaires au renouvelable sont prévues, ce qui correspond à la demande de sécurisation des investisseurs privés pour s’engager financièrement (Mais on connaît, en France et d’autres pays, la situation difficile des comptes publics: la stratégie globale de mobilisation des financements est encore à préciser. Des choix plus ou moins « populaires », ou excluant des solutions efficaces mais plus coûteuses, sont évidemment possibles).
  • Pour la démocratie participative, l’évaluation note que les processus de consultation publique sur les choix gouvernementaux définitifs gagneraient à être plus inclusifs, les délais allongés dans le temps, et que les populations manquent parfois d’information (Nous avons noté que la France devient d’ailleurs un plus mauvais élève avec des délais de participation réduits pour la population, voire supprime parfois débat ou enquête publics sur certains projets énergétiques « d’intérêt général public majeur » ou sites industriels « clés en main », afin de ne pas en ralentir la réalisation; ceci ne favorisant pas le dialogue et nourrissant parfois la contestation).

Pour remonter dans le temps, voici quelques liens utiles: 

2019 – Avis des syndicats européens – Projets de plans nationaux intégrés en matière d’énergie et de climat – une critique intéressante du premier plan européen, avec un point de vue plus social toujours actuel: FR-Adopted

2021 – Rapportages Climat de la France – Lutte contre le changement climatique / déclinaison institutionnelle – Rapportages Climat de la France | Ministères Aménagement du territoire Transition écologique

2023 – Publication de recommandations précédentes – La Commission appelle à améliorer les PNEC mis à jour

France – La Ministre Pannier-Runachier a été auditionnée le 20 mai à propos du Plan national d’Adaptation au Changement Climatique, le PNACC – 3.

Il s’agissait donc de vérifier le volet résilience par rapport aux impacts du dérèglement climatique ( prévention émission de GES avec l’UE / versus remédiations sociales de l’impact climatique: les dégâts supportés par la population) . « L’Affaire du siècle » note ceci: « Face à notre demande d’augmentation du financement, la ministre s’est contentée d’énumérer des budgets existants — largement insuffisants — sans annoncer aucun moyen supplémentaire. Pour les maisons fissurées (RGA), elle a confirmé un budget absurde : 28 millions d’euros, soit à peine 3€ par maison ! Résultat : l’adaptation reste dramatiquement sous-financée. Même le président du Haut Conseil pour le Climat alerte : la priorité, c’est d’augmenter les moyens. Oui, la ministre reconnaît qu’il y a des inégalités sociales et territoriales, et que les plus précaires paient le prix fort. Mais à part promettre une énième étude, rien. Pas d’action immédiate, pas de co-construction avec les personnes concernées. Pourtant, des solutions existent déjà. La ministre a beaucoup vanté ses gouvernements et les précédents d’avoir réussi à diminuer les émissions de GES, mais les faits la contredisent. Tout d’abord, une partie de cette baisse est due à des facteurs conjoncturels tels que la crise du Covid et non à des mesures politiques structurantes. Ensuite, la baisse des émissions a fortement ralenti en 2024, alors qu’il faudrait au contraire accélérer pour respecter nos objectifs. Nous nous éloignons de nos objectifs. Alors même que la première mesure d’adaptation au changement climatique c’est… l’atténuation ».

 

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