Projet d'autoroute ferroviaire de Tarnos : le débat est nourri et conforte nos analyses

Suite à notre participation au débat* (voir l’article renvoyant à nos positions ), nous publions des contributions à l’enquête publique  corroborant nos analyses:
celles de la Sepanso 1, des
Cheminots CGT 2 et des Amis de la Terre 3.

* Lire aussi précédemment https://www.cade-environnement.org/2014/06/04/2227/#more-2227

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SEPANSO LANDES

logo sepanso landesCagnotte, le lundi 2 juin 2014
Courrier destiné à M. Jean-Pierre CHAULET, Président de la Commission, Messieurs les membres de la Commission
Objet : Transmission des observations de la Fédération SEPANSO Landes
Enquête publique relative au projet d’Autoroute Ferroviaire Atlantique

  • Porteur du projet : Réseau Ferré de France ;
  • Fin de l’enquête publique : le jeudi 5 juin inclus.

Transmission de nos observations à Madame la Secrétaire Générale de la Préfecture des Landes (mireille.larrede@landes.gouv.fr) et aux communes landaises suivantes : mairie@ville-tarnos.fr ♦ contact@tyrosseville.com ♦ information@dax.fr mairie.morcenx@wanadoo.fr ♦ mairie@labouheyre.fr.
Notre Fédération suit attentivement tous les dossiers concernant l’environnement, et tout particulièrement les dossiers relatifs aux transports. Ce projet fait partie du grand projet de RFF pour le Sud-Ouest (GPSO)  dont nous avons déjà eu l’occasion de dire tout le mal que nous en pensions dans notre cahier d’acteur ; nous avons toutefois bien en mémoire que le chef de projet de RFF, Monsieur Maudet, nous avait bien expliqué que le volet autoroute ferroviaire était « imposé par le lobby de l’industrie ferroviaire » (nous tenons à préciser : française !) Nous avons toutefois examiné aussi objectivement que possible le dossier présenté dans le cadre de l’enquête publique qui vous a été confiée (Arrêté préfectoral signé par le Préfet du Pas-de-Calais le 27 mars 2014)
1° Observations générales

1.1. Prévision de trafic

♦  Lors du Débat Public, en 2006, les associations, dont la SEPANSO, avaient contesté les données de Réseau Ferré de France (RFF). Deux contre-expertises avaient permis de nous donner raison. Nous constatons maintenant que RFF semble revenu à la raison, en ce qui concerne le trafic potentiel, puisque RFF n’envisage plus que 4 allers et retours sur l’axe Tarnos-Dourges entre 2014 et 2029.
♦ Lors du Débat Public, les associations environnementales et des organisations professionnelles avaient fait observer qu’il conviendrait de moderniser les infrastructures existantes afin de faire circuler des trains longs afin de re-dynamiser le trafic fret. Nous constatons maintenant que RFF envisage d’utiliser des trains de 750 mètres.
Première observation : on ne peut que regretter que RFF ait été aussi peu à l’écoute de la société civile. Reste à voir si le nouveau projet présente toutes les qualités requises pour être acceptable !

1.2. Choix technique

♦ L’idée de transporter des camions entiers, ou ce qui serait un moindre mal des remorques sur des wagons surbaissés, se traduit par un gaspillage de place et d’énergie, une efficacité insuffisante (358 tonnes en moyenne), une obligation de travaux de génie civil très importants (modification des tunnels et surtout un coût final du transport élevé.
♦ La SEPANSO tient à faire observer que la Deutsche Bundesbahn n’a pas retenu cette idée, mais a choisi de développer le développement de transport de containers, allant jusqu’à imaginer et réaliser des systèmes de transferts automatisés des containers de voie à voie pour éviter les pertes de temps sur les triages. Ce choix a été dicté par la souplesse du transport combiné qui permet un acheminement des marchandises sur un maillage plus étendu que celui d’une autoroute ferroviaire ; et surtout par un coût de transport inférieur : 0,6 €/km au lieu de 0,9 €/km.
Seconde observation : la généralisation des containers pour les transports maritimes et la croissance de ces transports auraient dû inciter RFF à vouloir capter l’acheminement de ces containers, souvent transportés à leur arrivée dans les ports par des camions. Alors que le report modal apparaît dans maints discours officiels, on ne peut que regretter qu’il n’ait pas fait l’objet de toute l’attention voulue. Ceci est d’autant plus étonnant que lors du débat public en 2006, la contre-expertise, demandée par les associations de protection de l’environnement, confiée au Bureau d’études SMA Pro Trans, avait déjà permis d’examiner ce projet d’autoroute ferroviaire ; or les conclusions des experts auraient dû dissuader RFF de poursuivre son projet.

1.3. Retours d’expérience

♦ Il y a peu de retours d’expérience. Nous nous référons donc à l’autoroute ferroviaire Bettembourg-Perpignan, pour laquelle nous avons le plus de données. En ce qui concerne le coût RFF a fourni les données suivantes : « Autoroute Ferroviaire Bettembourg Perpignan – 1 050 km – 730 à 750 € par PL Autoroute Ferroviaire Atlantique : entre 0,75 et 0,85 € / PL / km ». Pour réussir à capter du fret, les responsables ont dû baisser les prix ! Pour limiter les pertes d’exploitation, les responsables ont décidé de compléter les rames avec des wagons porte containers… La Cour des comptes qui a évalué le dossier a écrit en 2012 : « Il en ressort que le concept peine à faire ses preuves sur les plans économique et financier… Les autoroutes ferroviaires ne pourront être une opportunité pour le fret ferroviaire qu’à la condition de démontrer leur capacité à fonctionner à terme sans aide financière publique récurrente. »
♦ La modification du cadre économique, à savoir la fermeture du centre Novatrans de Perpignan, explique peut-être en partie une amélioration de l’exploitation de l’autoroute ferroviaire Bettembourg-Perpignan. Ne déshabille-t-on pas Pierre pour habiller Paul ? Le projet ne va-til pas porter atteinte à l’existant ?
♦ Le choix de Modalohr est problématique (nous en voulons pour preuve que la Deutsche Bundesbahn n’en a pas voulu comme a pu me l’expliquer M. Joachim Fried, Leiter Wirtschaft, Politk, Regulierung, Detusche Bahn AG). En effet les wagons ne sont pas assez surbaissés, de ce fait leur vente qui rapporte au constructeur, induit des dépenses d’infrastructures considérables. Le lobbying de Monsieur Philippe Essig et autres est-il tolérable ? Nous ne pensons pas que les pays étrangers accepteront de modifier leurs infrastructures pour accueillir les rames de wagons Modalohr. Alors que l’Union européenne affiche clairement sa volonté de construire un réseau de transport aux mêmes caractéristiques dans tous les états-membres, la stratégie française paraît aller à l’encontre du projet des institutions européennes.
♦ Le bilan économique de nouveau modèle d’exploitation ferroviaire n’incite pas l’optimisme car il nous rappelle étrangement celui du modèle LGV-que-tout-le-monde-nous-envie ! En effet ce projet suppose des investissements énormes : 55 M€ pour les pôles de Dourges et Tarnos, des achats de wagons surbaissés Modalohr (coût unitaire : 400 000 €), des matériels roulants pour 100 M€ et des travaux dont les coûts estimés sont de 133 M€. On pourrait bien avoir une réalisation sans lendemains.
Troisième observation : Cet investissement global de 288 millions d’euros dont les perspectives d’amortissement paraissent aléatoires, sinon très lointaines, dans un contexte économique particulièrement incertain. Les perspectives géographiques du projet paraissent étriquées dans la mesure où le modèle français (gabarit, matériel…) risque fort de ne pas susciter l’adhésion des autres Etats membres de l’Union européenne.
2° Observations relatives au secteur géographique aquitain

2.1. Novatrans

♦ Le centre de Dax a été fermé. Il subsiste le centre de Mouguerre et le centre d’Hendaye qui assurent le report modal par containers. Nous craignons que l’autoroute ferroviaire, surtout si l’on assiste à des tarifs attractifs comme ceux qui ont été définis pour pérenniser la ligne Bettembourg-Perpignan, n’incite les responsables à liquider les plateformes de Mouguerre et d’Hendaye. Nous souhaitons que RFF garantisse la pérennité des installations de Mouguerre et d’Hendaye.
Quatrième observation : La SEPANSO regrette que les responsables des transports ferroviaires en France n’aient pas accru leurs efforts pour dynamiser les transports de marchandises par containers. Il est, en effet, le plus souvent moins coûteux d’optimiser un système existant que de créer un nouveau système.

2.2. Trains longs

♦ La SEPANSO souhaite revenir sur le sujet afin de lever toute ambigüité. Nous avons écrit que nous étions favorables aux trains longs, mais nous tenons à rappeler que nous sommes favorables à une restauration de la politique du wagon isolé. Nous regrettons que l’acheminement des approvisionnements des « grandes surfaces » qui était réalisé par la SNCF à Dax (embranchement de Peyrouton), à Labenne … ait disparu ; désormais ce sont des camions qui engorgent les voies routières et nécessitent des aménagements onéreux. On voit le gap entre les discours et les actions.
♦ Nous attirons l’attention sur la réflexion qui semble insuffisante en ce qui concentre la constitution des trains longs. Il semble indispensable de prévoir l’aménagement de l’infrastructure en allongeant la plateforme Hendaye-Irun pour pouvoir former les trains longs allant soit vers le nord, soit vers le sud.
Cinquième observation : la SEPANSO souhaite une remise à plat de toutes les données relatives au fret (information du public en vertu de la Convention d’Aarhus) afin que toutes les parties prenantes (acteurs économiques, salariés, populations riveraines …) puissent fournir des pistes fiables pour que soient développés des systèmes complémentaires de transports de marchandises.

2.3. Intégration du projet dans l’environnement à Tarnos

  • La SEPANSO s’oppose à la destruction du boisement envisagé par RFF
  • La SEPANSO craint les pollutions induites sur le cours d’eau voisin et la nappe phréatique.
  • La SEPANSO s’inquiète des risques accrus dans un secteur sensible (site SEVESO)
  • La SEPANSO se demande si le bilan carbone a bien intégré toutes les émissions de gaz à effet de serre qui seront induites par l’ensemble des travaux modificatifs des voies.

Sixième observation : La SEPANSO tient à faire constater que le dossier comporte tellement de lacunes, qu’il est impossible d’émettre un avis catégorique sur le projet. Si le projet concerne essentiellement des voies existantes, il suppose aussi une consommation d’espace pour les plates formes qui n’a pas été évaluée

2.4. Acceptabilité sociale

♦ Nous constatons que le projet suscite une franche hostilité des populations locales basques et landaises (cf Sud-Ouest 26 avril 2014 – par exemple, où l’on voit que Mme Pierrette Fontenas, qui a été maire de Tarnos et conseillère générale du canton, fait partie des opposants).
♦ Nous constatons une tendance marquée à la consommation de biens produits localement même si la croissance de commandes par Internet induit de nouveaux besoins de transports. Il y a donc une réelle incertitude sur les besoins futurs.
♦ Mur de camions : en 2006 pour faire accepter ses projets, RFF utilisait l’hostilité des populations riveraines aux interminables caravanes de camions sur la route, se traduisant parfois par des accidents fort graves. Entre temps, la France a confié à une entreprise privée le soin de transformer l’A10 en autoroute A63 en mettant celle-ci à 2 x 3 voies. Ainsi les camions qui n’étaient pas autorisés à effectuer des dépassements, peuvent maintenant rouler librement et concurrencer le rail. Sachant que la SNCF a une filiale (Geodis) qui achemine des marchandises par camions, on observe une situation cornélienne : autoroute ou autoroute ferroviaire ?
♦ Travaux : les usagers vont devoir à nouveau subir des perturbations induites par la réalisation du nouveau gabarit nécessaire pour la circulation des wagons Modalohr. Il est étonnant de constater que RFF ne semble pas se soucier de l’opinion des voyageurs pourtant déjà soumis à rude épreuve (Avis du Comité Economique et Social Européen sur la qualité des services ferroviaires – TEN 495 – 13 décembre 2012)
Septième observation : Il ressort des échanges que nous avons pu avoir avec divers citoyens que la plupart estime que l’argent destiné à l’investissement propose pourrait être utilisé plus judicieusement par RFF.

2.5. Avis de l’Autorité Environnementale (24 pages)

♦ L’autorité environnementale, sans l’écrire explicitement, considère que l’étude d’impact initiale est insuffisante puisqu’elle demande toute une série d’études complémentaires, en particulier une véritable étude d’impact (faune-flore …) pour les plateformes.
♦ La SEPANSO se demande si le bilan carbone a bien intégré toutes les émissions de gaz à effet de serre qui seront induites par l’ensemble des travaux modificatifs des voies.
Huitième observation : il semble donc impossible d’accepter le projet en l’état.

Conclusion

  • Considérant le rapport entre trafic espéré et investissement,
  • Considérant la nécessité de généraliser un nouveau gabarit,
  • Considérant les coûts de la mise aux norme des lignes,
  • Considérant les obstacles locaux (risques liés aux sites SEVESO),
  • Considérant les incertitudes économiques,
  • Considérant les problèmes environnementaux que poserait la réalisation à Tarnos,
  • Considérant les oppositions manifestées par des citoyens organisés au sud des Landes, mais également ailleurs en France…
  • La Fédération SEPANSO Landes prie la Commission d’Enquête
    de bien vouloir émettre un avis défavorable au projet d’autoroute ferroviaire Atlantique.

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2

Syndicats CGT cheminots
d’Hendaye et Bayonne

 logo cgt-cheminots
Motion du Syndicat des cheminots de Bayonne et Hendaye

Les syndicats CGT des cheminots de Bayonne et Hendaye, très attachés au transport ferroviaire et à son développement, émettent des réserves sur le projet présenté pour les raisons suivantes :
♦ Il met en péril l’emploi cheminot SNCF sur le site du port de Bayonne, car l’ensemble du travail au sol, ainsi que les dessertes vers le site de transbordement seront assurés par une filiale privée de la SNCF (l’entreprise VIIA). Le chiffre de 65 embauches annoncé nous paraît surestimé pour mieux faire accepter ce projet (en effet, ce chiffre est équivalent au nombre d’agents présents sur le triage d’Hendaye qui traite bien plus de 4 trains aller-retour par jour). De plus, il n’est pas précisé dans le projet que les salariés de VIIA viendront concurrencer directement le personnel SNCF déjà en place sur Bayonne et que cela entraînera donc une diminution du nombre d’agent SNCF (le même schéma s’est produit au Boulou). Le solde positif des embauches sera donc bien moindre que celui annoncé dans le projet et les emplois crées le seront au détriment d’emplois existants avec des conditions sociales plus basses pour les salariés.
♦ L’implantation sur le site de Tarnos n’est pas conforme à la logique de transit sur le territoire Français. En effet, un tel projet devrait se situer plus proche de la frontière ou directement sur le territoire espagnol. S’il fallait choisir un site au delà de Bayonne, un site déjà dédié au transbordement de marchandises du camion vers le wagon comme le Centre Européen de Fret de Mouguerre serait bien plus approprié (Le choix du site de Tarnos répond avant tout, à une logique financière et pas au bon sens ni à l’intérêt général, le site de Tarnos appartenant au même groupe que l’entreprise VIIA).
♦ Le principal argument utilisé par VIIA pour défendre l’implantation à Tarnos au lieu de Mouguerre est le besoin de déplacement de 2 passages à niveaux (cela coûterait pourtant bien moins cher que les 60 millions d’Euros des contribuables nécessaires à l’aménagement du site de Tarnos). De plus, sur l’autoroute ferroviaire Le-Boulou – Bettembourg, afin de rentabiliser l’autoroute ferroviaire et d’optimiser les trains qui ne sont pas remplis par les transporteurs, les trains sont complétés par des caisses mobiles (¼ des trains environ) ce qui ne sera pas possible sur le site de Tarnos, celui-ci ne disposant pas de grue, alors que cela aurait été possible sur le site de Mouguerre.
♦ Le manque de pertinence de la réponse apportée par une autoroute ferroviaire vis à vis du besoin du tissu industriel Français composé essentiellement de PME et PMI exclut de fait de l’offre, puisqu’il ne répond qu’à une logique de transit. De plus, l’expérience montre que la même organisation sur l’axe Méditerranée ne fonctionne pas, et la SNCF tracte déjà un train Dourges au départ d’Hendaye. Cela entraînera un report sur la route de marchandises aujourd’hui transportées par le rail depuis Hendaye vers Tarnos, voir même depuis toute l’Espagne.
♦ Le lobbying du constructeur de wagons MODALOHR qui réalise des bénéfices sur la vente de ses wagons hors de prix, alors que d’autres solutions existent (conteneurs, wagons poches) permettant une économie de plus de 50 % sur l’achat du matériel. De plus, les infrastructures existantes doivent être modifiées pour permettre le passage de ces wagons (tunnels, ouvrages d’art) pour un coût annoncé de 188 millions d’Euros, ce qui représente un surcoût exorbitant. Le choix de cette technique par rapport à la technique des caisses mobiles (en transportant la remorque du camion en plus de la caisse) entraîne un « poids mort » d’environ 20%. L’ensemble de ces points engendrerait une hausse des tarifs au km pour les transporteurs et limiterait l’attrait de ce mode de transport et les bénéfices annoncés.
♦ Le Business-plan fait état de train de 1050m à l’horizon 2019 (il est à noter que la perte de 20% de charge due au choix des wagons MODALHOR sera à peine compensée par cette augmentation de longueur). N’est-ce pas là également un argument pour réussir à rendre attractif ce projet? Le choix du site de Tarnos ne permettra pas en l’état de former des trains de 1050 mètres, (tous les trains de l’autoroute ferroviaire devront obligatoirement passer par le triage de Bayonne avant d’être livré ou après être sorti du site de SETRADA). Or le chantier de Bayonne est uniquement doté d’une seule voie de 750 mètres et aucune demande de travaux n’est prévue pour l’instant pour recevoir et traiter des trains de 1050m. De plus la circulation de trains de 1050m imposerait la modification de tous les garages sur l’ensemble du parcours (en cas d’incident sur le train ou tout simplement pour laisser passer d’autres trains) et cela n’a pas été pris en compte pour le moment. Avec la situation économique de RFF et sa dette colossale, nous sommes en droit de nous demander si cela se fera un jour?
♦ Le recours au subventionnement public pour un projet qui ne répond pas aux besoins des industriels du territoire. Sur l’autoroute ferroviaire de Le Boulou-Bettenbourg, il y a eu 3 ans de subventions publiques versées, et nous n’avons aucune information sur les aides publiques prévues en plus des 300 Millions d’Euris pour le fonctionnement  de l’autoroute ferroviaire Atlantique. L’argent public doit aller en priorité, vers des alternatives qui correspondent aux besoins du tissu économique local (wagon isolé).
Pour l’ensemble de ces éléments, les syndicats CGT des cheminots de Bayonne et Hendaye se positionnent contre le projet d’autoroute ferroviaire tel qu’il est prévu entre Tarnos et Dourges.

 Fait à Bayonne le 29/04/2014

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3

AMIS DE LA TERRE

logo amis de la Terre

Monsieur le Commissaire Enquêteur,

L’autoroute ferroviaire Atlantique Tarnos Dourges représente
l’exemple parfait de ce que nous appelons les GPI2 (Grands Projets Inutiles et Imposés). Elle n’est qu’une composante d’un ensemble encore plus absurde : le GPSO.

Nous déplorons fortement l’omerta dans laquelle les associations ont été tenues pour cette enquête publique. Elles possèdent pourtant une maîtrise importante de ce type de dossier. Une envie d’entre soi peut être, à moins que ce ne soit la peur de la circulations d’informations réelles dans un processus public obligatoire, mais parfois gênant.
Au départ, ce projet fut mal portée sur les fonds baptismaux par le maître d’oeuvre. En effet, lors d’une réunion concernant le GPSO, Monsieur Maudet, alors responsable de l’ensemble du GPSO pour RFF, a déclaré sans consentir à ce que se soit porté au compte rendu de la réunion : « RFF a toujours été contre l’autoroute ferroviaire, c’est une solution qui nous a été imposée par le lobby de l’industrie ferroviaire ». De nombreux témoins peuvent confirmer ceci.
Hélas, les lobbys dénoncés par Monsieur Maudet ont beaucoup de ressources. Ils sont parfaitement capables d’imposer un projet totalement anachronique, dont la seule qualité est de générer des flux financiers intéressants pour eux.
Pourtant, l’inutilité de cette autoroute est facile à montrer :

Concernant le trafic

En 2006, RFF prévoyait dans un scénario dit moyen un trafic poids lourds international à Biriatou de 12 000 PL/jour pour 2013. Ce scénario était basé sur une croissance du trafic de 3,2 % par an, avec 8100 PL/j comme base 2004. Les associations s’étaient élevées contre ces estimations fantasmagoriques. Nous dénoncions une croissance du PIB trop élevée. Nous avions informé les instances que nous possédions une information importante.
En effet, l’Espagne était alors le troisième producteur automobile d’Europe, et nous savions que les constructeurs européens planifiaient une délocalisation d’une grande partie des productions espagnoles vers l’Europe de l’Est. En conformité avec nos informations, l’Espagne passait de plus 3 millions de véhicules/an à moins d’1 million entre 2004 et 2007. Ceci avant que la crise ne frappe ce pays. Or cette industrie représentait entre 40 et 50 % du fret entre le bloc ibérique, et l’Europe. Nous avions également soulevé, entre autre, l’incidence de l’augmentation prévisible des carburants sur la réduction des échanges, paramètre totalement écarté par RFF. Tous nos arguments furent rejetés, et la crise systémique vint aggraver les choses.
Nous avions raison, le trafic n’allait pas croître !
Les données du CETE pour l’observatoire des trafics en Pays basque, confirment nos doutes sur la qualité de l’argumentaire de RFF :
♦ Baisse des trains de marchandises du côté espagnol sur les grandes gares Basques et frontière -40 à -50 % entre 2006 et 2011. Le trafic ferroviaire de fret à Irun baissait dans la même période de 45 % à l’exportation, et de 49 % à l’importation.
♦ Le trafic routier poids lourds reste stable avec une variation marginale de 0,2 % entre 2006 et 2011, sans variation entre 2010 et 2011. Il représente à Biriatou 33 % des véhicules PL (environ 45 % pour le transit), soit 8 600 poids lourds par jour pour 8600 en 2006.
♦ Entre Gijon et St Nazaire, les autoroutes de la mer, beaucoup plus économiques, donnent une moyenne de 68 équivalent poids lourds par traversée. Elles n’existaient pas en 2004
♦ Le tonnage de Pasajes chute de 41 % (base 60 Mt), Bilbao de 17 % (base (40Mt), celui de Bayonne de 8 % base (4,5Mt). Bayonne réduit la casse, car sauvée temporairement par le bois de tempête massivement exporté depuis ce port.
La Cour des Comptes dans son rapport public annuel de février 2012 précise : » Le transport international de marchandises a été divisé par trois en dix ans. Le transit de marchandises sur le territoire a connu une baisse encore plus prononcée.  »

Impact de l’autoroute ferroviaire sur le mur de camion

Lors du débat public sur le GPSO, RFF mettait en avant le mur de camions qui était en devenir. Examinons maintenant les données à la lumière de l’autoroute modèle Perpignan-Bettembourg.
Un problème est généré par des causes, qui produisent des effets ou conséquences. Un industriel digne de ce nom utilise un outil simple et remarquable pour résoudre une problématique.
Cet outil permet de déterminer les principales causes responsables des effets (conséquences) les plus importants. Cet outil, c’est le diagramme de PARETO. Il nous dit qu’environ 20 % des causes sont responsables de 80 % des effets. Travailler sur ces 20 % des causes permet d’améliorer à moindre coût le problème. Il faut donc s’attacher à réduire ce qui fait le mur de camion, et non pas mettre les camions dans des ailleurs improbables.
Dans la documentation fournie pour l’enquête publique, il est indiqué 4 A/R par jour pour modèle de référence Perpignan-Bettembourg mise en service en 2007. Ceci est totalement faux, mais RFF nous a habitué à mentir sans vergogne. Il y a entre 1 et 4 A/R tous les jours. Il suffit pour s’en convaincre de visualiser la fiche des possibilités 2014
sur le site de Lorry Rail :

  • 2 jours à 4 A/R
  • 3 jours à 3/A/R
  • 1 jours à 2 A/R
  • 1 jour à 1 A/R

Ceci nous donne 20 A/R par semaine soit une moyenne de 2,9 A/R par jour (il y a des trains le dimanche, ils en font la publicité). Nous sommes loin des 4 A/R par jour annoncés.
Sur l’AF Perpignan-Bettembourg, le taux de remplissage était de 80 % en 2011. Un train de 750 m représente au total 40 semi-remorques possibles. En arrondissant à 3 A/R par jour, nous obtenons 6 trains, soit 240 camions possibles et avec le taux de remplissage du modèle en 2011 nous obtenons 190 camions par jour. En comparant avec les 8600 camion/jour à la frontière, nous enlevons royalement 2 % du trafic routier. Avec l’autoroute ferroviaire, nous luttons très mal sur les conséquences, sans toucher aux causes.

L’autoroute ferroviaire est un non sens industriel

Il est bon de rappeler aussi que Lorry Rail est une société française à statut privé dont le siège social est au Luxembourg, paradis fiscal bien connu. La SNCF a peut être été priée de racheter cette société à cause de ses pertes continuelles. C’est la bonne technique de la privatisation des profits, et la socialisation des pertes.
L’autoroute ferroviaire est un gaspillage d’énergie par rapport aux
trains de fret classiques.

Une remorque de semi-remorque de 12 m pèse à vide environ 7 tonnes. Un container équivalent de 12 m 4,2 t (longueur identique). Transporter une semi-remorque, c’est donc un transport inutile de 3 t. Ceci enlève de la capacité d’emport d’un train, augmente sa consommation. Autre conséquence, la modification onéreuse de nombreuses parties de l’infrastructure.
Les trains d’autoroute ferroviaire transportent moins de fret, pour des dépenses supplémentaires non négligeables en période de crise longue.

Rentabilité

192 camions par jour, au mieux, pour un investissement d’environ 350 millions d’€ sans compter l’entretien, les coûts de fonctionnement, et les coûts supplémentaires « oubliés « .
Là aussi RFF nous a montré sa grande capacité à sous évaluer les coûts et surévaluer les revenus.
L’autoroute ferroviaire s’adresse à des transitaires qui sont en capacité de créer des infrastructures de livraison/emport à chaque bout du trajet. Or l’une des extrémité (Espagne) est constituée essentiellement de petits artisans transporteurs qui ne disposent pas des moyens nécessaires pour utiliser l’autoroute ferroviaire. Géodis, autre filiale de la SNCF, et gros transporteur routier, est soupçonnée, dans certains cas de sous traitance en cascade, de faire payer les frais d’autoroutes par les chauffeurs. C’est dire si elle utilisera une autoroute ferroviaire dont le coût d’utilisation est notablement supérieur à la liaison routière (surcoût au km estimé à 40 % environ, voir l’expérience modèle).
L’autoroute modèle Perpignan-Bettembourg a été épinglée par la Cour des Comptes dans son rapport public annuel de février 2012 :  » Il en ressort que le concept peine à faire ses preuves sur les plans économique et financier. Les autoroutes ferroviaires ne pourront être une opportunité pour le fret ferroviaire qu’à la condition de démontrer leur capacité à fonctionner à terme sans aide financière publique récurrente. Le service d’autoroute ferroviaire ne pourra donc pas atteindre en 2015 les objectifs de l’Engagement national pour le fret ferroviaire de dix allers-retours par jour… « 
En conséquence, aucune rentabilité ne peut être attendue. Toujours selon la Cour des Comptes, même avec une large palette de subventions, l’autoroute ferroviaire ne peut pas couvrir ses charges de fonctionnement. Il lui est donc impossible d’amortir l’investissement.
Or, un article des statuts de RFF lui interdit d’engager des investissements non rentables qui pourraient augmenter sa dette. Mais, avec plus de 32 milliards de dettes, nous ne sommes plus à quelques centaines de millions d’€ près.
En matière de GPI2, nous savons parfaitement que l’expérience ne permet qu’une seule chose : persister dans l’erreur.

Les pistes à suivre

Pour nous, la seule solution est de ne pas réaliser ce GPI2 que constitue l’autoroute ferroviaire
Tarnos/Dourges. Il faut au contraire redynamiser le transport multimodal par UTI (containers, caisses mobiles…). Il convient de mettre en place au plus vite des trains longs, avec les moyens de traction suffisants. Par exemple, sur l’autoroute modèle, il faut atteler une deuxième locomotive pour pouvoir atteindre le plateau de Bettembourg. Il conviendra aussi de revenir sur la suppression de la technique des wagons isolés, qui représentaient 40 à 50 % du trafic de fret ferroviaire. Voila des subventions intelligemment utilisées.
Avec le passage imminent, ou déjà fait, du Pic de Hubbert pour le pétrole, le coût du carburant ne cessera de croître. Le transport doit donc être réduit à l’essentiel, à l’utile, avec des moyens d’une juste sobriété (pénalisation du transport routier de longue distance, suppression des transports indécents…). Toute gabegie doit être supprimée, et c’est bien dans cette catégorie que nous plaçons l’autoroute ferroviaire.

Mémoire des Amis de la Terre des Landes concernant l’EP
autoroute ferroviaire Atlantique.

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