http://www.lemonde.fr/economie/article/2017/03/29/eternit-geant-de-l-amiante-perd-en-appel_5102533_3234.html#xtor=AL-32280270
La décision des juges belges met fin à 17 ans de procédure et permet à toutes les victimes de déposer plainte. LE MONDE ECONOMIE | 29.03.2017 à 11h24 | Par Jean-Pierre Stroobants (Bruxelles, Correspondant)
Une famille belge engagée dans une longue bataille contre la multinationale de l’amiante Eternit a remporté une nouvelle manche, mardi 28 mars. La cour d’appel de Bruxelles a mis un terme à dix-sept années de procédure en estimant qu’Eternit connaissait depuis les années 1970 les effets cancérigènes de l’amiante-ciment mais n’avait pas pris les mesures nécessaires pour protéger ses travailleurs et les personnes vivant à proximité de ses usines.
La victoire de la famille Jonckheere est toutefois un peu amère : les juges d’appel ont réduit à 25 000 euros – au lieu de 250 000 euros selon un jugement du tribunal civil en première instance – l’indemnité à verser aux descendants de Françoise Vannoorbeeck-Jonckheere, morte du mésothéliome, un cancer de la plèvre causé par l’amiante. L’entreprise lui avait proposé, dans les années 1990, un dédommagement de 42 000 euros, qu’elle refusa. Son mari, ingénieur dans l’entreprise, est décédé en 1987, deux de ses fils sont morts en 2003 et 2009. Ils vivaient depuis 1958 à proximité de la principale usine du groupe, à Kapelle-op-den-Bos, dans le Brabant flamand.Françoise Vannoorbeeck, décédée peu de temps après le dépôt de sa plainte, en 2000, a été contaminée par « l’amiante bleu », l’une des trois variantes de cette matière – considérée comme la plus dangereuse –, dont la production a été arrêtée en 1977. D’où le fait que la multinationale a plaidé – en vain – la prescription des faits : le juge bruxellois de première instance avait estimé que la prescription ne pouvait courir si une victime ignorait son mal, ce qui fut, longtemps, le cas de Françoise Vannoorbeeck.
« C’est un grand jour »
« La décision de la cour d’appel permettra désormais à toutes les victimes de déposer plainte contre Eternit ou d’autres firmes », souligne Me Jan Fermon, l’avocat de la famille. Des représentants des associations de victimes venues de plusieurs pays – Andeva en France, mais aussi d’Italie, d’Espagne et du Japon – manifestaient, mardi, devant le palais de justice de Bruxelles pour apporter leur soutien aux plaignants. « C’est un grand jour. Cet arrêt représente, pour nous, un énorme soulagement et nous satisfait pleinement puisqu’il reconnaît la responsabilité et la faute de l’entreprise », expliquent Eric et Xavier Jonckheere, les deux fils encore en vie de Françoise Vannoorbeeck. Comme un troisième enfant du couple décédé, ils ont eux-mêmes été contaminés par des fibres d’amiante.
A l’issue du jugement, Eternit a publié, mardi, un communiqué indiquant qu’elle étudierait « attentivement » l’arrêt avant de décider de se pourvoir, ou non, en cassation. « L’amiante est un problème de société qui dépasse Eternit », estime l’entreprise.
« Bombe à retardement »
En 2011 déjà, la justice belge s’était montrée cinglante à son égard, évoquant son « cynisme incroyable » et la « chasse au profit » à laquelle s’étaient livrés ses dirigeants. Le juge du tribunal civil avait affirmé la nocivité d’un produit industriel longtemps jugé miraculeux puisqu’il résistait notamment à la chaleur et au feu. Il a été utilisé pour des plaques, des dalles, des tuiles, des conduits d’évacuation, etc. Eternit l’a exporté dans le monde entier et de très nombreux bâtiments vieux de plus de vingt ans comportent de l’amiante, à l’insu de leurs occupants et, souvent, des entrepreneurs qui y effectuent des travaux sans prendre les précautions nécessaires. Le produit est dangereux lorsqu’il est percé, scié ou déplacé, ce qui libère des fibres qui sont ensuite inhalées. En Belgique, un inventaire des immeubles concernés a été établi, mais il ne porte que sur le secteur public. Un « fonds amiante » a, par ailleurs, été constitué et permet à des personnes contaminées d’obtenir des indemnités. Des juristes déplorent qu’il soit alimenté seulement par les pouvoirs publics et non par les entreprises qui ont négligé le danger du produit. Ce danger de l’asbeste – l’autre terme désignant l’amiante – a été démontré dès 1967, mais il a fallu attendre 1997 pour qu’elle soit interdite en Belgique et en Europe.
Elle aurait déjà causé la mort de quelque 200 000 personnes, mais reste autorisée dans certaines parties du monde, en Asie notamment. D’où l’inquiétude des scientifiques, qui évoquent une « bombe à retardement » et prédisent de nombreux autres décès, la maladie se déclenchant généralement au bout de vingt ou trente ans. Selon Andeva, l’association française des victimes, on trouverait 20 millions de tonnes d’amiante dans l’Hexagone.
Un millier d’actions introduites chaque année depuis vingt ans – Les ennuis judiciaires d’Eternit et d’autres sociétés ne devraient, en tout cas, pas s’arrêter. En France, on recense un millier d’actions introduites chaque année par des victimes depuis vingt ans. Des arrêts favorables aux victimes ont été rendus dès 2002 par la Cour de cassation. Le Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante a été créé la même année et concerne les victimes et leurs ayants droit, pour toutes les maladies liées à l’amiante, sans que ceux-ci aient à démontrer l’existence d’une faute. Des décrets concernant le travail et les bâtiments ont fait de la réglementation française l’une des plus avancées. Le contrôle de l’application des textes est toutefois insuffisant, déplore l’Andeva.
L’association réclame des procès au pénal afin de juger « tous les responsables ». Une trentaine de dossiers sont toujours à l’instruction, concernant notamment Eternit, qui fut, avec Saint-Gobain, l’un des principaux producteurs d’amiante en France jusqu’à l’interdiction de la fibre.
Le procès le plus retentissant visant Eternit a eu lieu en Italie, où étaient poursuivis deux de ses dirigeants. L’amiante aurait causé 3 000 morts dans ce pays, où étaient implantées plusieurs usines. De lourdes condamnations sont tombées en 2012, mais, deux ans plus tard, la Cour de cassation italienne mettait un terme à vingt ans d’enquêtes et d’espoir en invoquant la prescription, les usines concernées ayant fermé en 1986. Le gouvernement, dirigé à l’époque par Matteo Renzi, avait évoqué sa «tristesse » et promis un « changement des règles du jeu ».
• Jean-Pierre Stroobants (Bruxelles, Correspondant)
Journaliste au Monde
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Les dernières barthes du CEF de Mouguerre doivent être préservées !
Le permis d'aménager ne doit pas être accordé, puisque d'autres solutions existent pour éviter la destruction de 12 hectares de barthes.
Les dernières barthes du CEF de Mouguerre doivent être préservées
Les barthes sont des zones humides qui jouent un rôle majeur pour préserver la ressource en eau, lutter contre les canicules, maintenir la biodiversité mais aussi pour prévenir des inondations les quartiers environnants. Leur destruction est interdite pour des projets qui peuvent se dérouler ailleurs ou autrement. C'est l'esprit de la loi et de la séquence « Eviter, réduire, compenser » qui impose d'éviter en tout premier lieu. C'est aussi pour cela que le CNPN (Conseil National de Protection de la Nature) a émis un avis défavorable au projet.
Le permis d'aménager demandé par la SEPA sur le CEF (Centre Européen de Fret) pour remblayer 12 ha de barthes ne doit pas être accordé par le Maire de Mouguerre :
- L'activité de l'entreprise DJO (Enovis) n'est pas liée au fret ferroviaire et on peut éviter de détruire les 3,3ha qui lui sont dévolus. D'autres implantations sont possibles : les friches industrielles du site des Salines tout proche du CEF, ou des emplacements déjà aménagés à Saint-Martin-de-Seignanx par exemple. Rien ne justifie qu'on l'installe sur les barthes.
- Le remblaiement pour les aménagements ferroviaires est prématuré. Britanny ferries (nouvel opérateur ferroviaire) peut commencer son activité dans l'espace déjà remblayé du CEF sans toucher aux barthes. Les autres opérateurs présents sur le CEF n'ont pas prévu leur éventuelle extension avant 2025. Le projet de Brittany ferries étant de transporter des camions d'Irlande en Espagne (camions actuellement sur des bateaux entre ces deux pays), il serait par ailleurs plus judicieux que ses trains (en provenance du port de Cherbourg) roulent jusqu'en Espagne pour éviter un surplus de camions sur l'A63 entre Mouguerre et la frontière.
- Le cadre de vie des riverains doit être préservé, et l'interdiction d'accès au CEF par la route de Briscous maintenue, comme c'était le cas jusqu'en 2022 avant la révision du PLU de Mouguerre. Le nouvel accès prévu (qui s'éloigne du noeud autoroutier) va aggraver les conditions de circulation déjà très difficiles sur ce secteur pour les habitants de Lahonce, Briscous, Mouguerre et au-delà. Les investissements publics doivent se tourner pour améliorer les transports du quotidien.
- Le remblaiement des barthes va aggraver les risques d'inondation des quartiers environnants sur Lahonce et Mouguerre, d'autant plus avec le changement climatique et la multiplication des événements extrêmes.
- Les impacts de cet aménagement débordant largement du CEF et affectant les habitants de Mouguerre et des communes voisines, ce permis d'aménager aurait dû faire l'objet d'une vaste concertation avec l'ensemble des habitants, des associations, des élus des communes voisines, du SCoT.
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