Chère démocratie locale sur l'intérêt général

Capture UPC RoubaixÀ partir de l’étude d’une table de quartier à Roubaix, cet article revient sur la façon discrète mais efficace avec laquelle les institutions, et en particulier les élus municipaux, tentent de contrecarrer l’organisation collective d’habitants mobilisés autour d’un projet de rénovation urbaine. Alors que les quartiers populaires sont souvent qualifiés de déserts politiques, cette expérience montre qu’il n’en est rien, mais que tout est fait pour empêcher la structuration de contre-pouvoirs à l’échelle locale.
Julien Talpin, « Une répression à bas bruit. Comment les élus étouffent les mobilisations dans les quartiers populaires », Métropolitiques, 22 février 2016. URL : http://www.metropolitiques.eu/Une-repression-a-bas-bruit-Comment.html
LIRE en conclusion :
S’il faudrait pouvoir systématiser l’analyse et observer plus finement le rôle du contexte politique sur d’autres territoires, ces éléments sont révélateurs du fonctionnement du jeu politique en France, ultra-professionnalisé, où les élus ne supportent pas qu’on vienne contester leur monopole de la légitimité démocratique, en dépit du nombre de voix décroissant qu’ils recueillent scrutin après scrutin [16]. Cette incapacité à appréhender des formes plus conflictuelles de construction de l’intérêt général est bien résumée, en creux, par un représentant de l’État lorsqu’il dit, s’adressant aux membres de la table de quartier : « Vous voulez être indépendant, et maintenant vous demandez à dialoguer avec la ville ; faut savoir ce que vous voulez », comme si les deux logiques étaient irréductibles, la discussion ne pouvant se faire que dans le cadre de dispositifs contrôlés par les institutions [17].
Tout semble fait pour empêcher l’émergence d’un contre-pouvoir local, quand bien même celui-ci parvient à faire participer les habitants, là où les institutions échouent le plus souvent. Ces difficultés sont révélatrices de la crainte, en France comme dans de nombreux pays, qu’inspirent les formes autonomes d’organisation collective des classes populaires. Elles semblent pourtant plus que jamais nécessaires, sans quoi celles-ci risquent de s’exprimer autrement, de façon peut-être moins constructive.
Dix ans après les révoltes qui ont frappé les banlieues de notre pays, alors que la colère gronde dans les quartiers sans trouver de canaux positifs d’expression, de telles mobilisations apparaissent comme des alternatives plus que jamais nécessaires à la vitalité de nos démocraties. Plutôt que de les réprimer, l’État devrait offrir des moyens pour assurer la pérennisation de tels collectifs autonomes, capables d’offrir une voix et une représentation aux quartiers populaires.

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